Texte de l’intervention:

Votre Commission de politique extérieure s’est penchée le 17 novembre passé sur la question de nos relations avec le Yuan législatif, soit le Parlement taïwanais. Elle a décidé, par 12 voix contre 11 et 2 abstentions, de déposer la présente motion, qui vise à demander à notre bureau de renforcer les relations du Conseil national avec le Yuan législatif.

Cette collaboration viserait notamment à contribuer au renforcement de la démocratie, à la promotion de la paix et de la stabilité dans la région, ainsi qu’à l’approfondissement des échanges économiques, politiques, scientifiques et culturels entre la Suisse et Taïwan. Le bureau de notre conseil propose de soutenir cette motion.

La majorité de la commission confirme ainsi son attachement aux relations entre la Suisse et Taïwan. Le renforcement de la collaboration avec le Yuan législatif constitue en effet un moyen de symboliser cet attachement et de soutenir les échanges présents et futurs entre nos deux pays. Il est question ici de défendre aussi les intérêts de la Suisse. Qu’il s’agisse de promotion de la paix, de renforcement de la démocratie ou encore de contribution à la stabilité, ce sont autant de notions fondamentales qui sont l’essence même de la politique étrangère de notre pays et sont au coeur de la motion qui vous est soumise.

En développant nos relations, nous participerions à rappeler notre attachement au caractère démocratique de ce pays et, au-delà de Taïwan, la nécessité de promouvoir la démocratie partout. Ceci relève tout à fait de la compétence d’un Parlement qui, faut-il le rappeler encore une fois, ne peut exercer ses responsabilités que dans un cadre démocratique.
La majorité de la commission considère aussi qu’il est dans l’intérêt de notre pays de défendre le statu quo de l’île en insistant pour que le statut de Taïwan soit tranché politiquement et pacifiquement par les parties concernées et en premier lieu par les Taïwanaises et Taïwanais. A l’heure actuelle, si la communauté internationale, comme les responsables politiques taïwanais d’ailleurs, appelle à la préservation du statu quo, le gouvernement de Pékin a quant à lui pris l’habitude de menacer militairement l’île tout en promettant en plus des représailles à quiconque exprimerait un soutien trop appuyé à la démocratie taïwanaise.

La situation s’est encore significativement tendue depuis le dépôt de cette motion, comme peuvent en témoigner aussi certains membres de notre conseil qui se sont rendus sur l’île à titre privé en février passé.

Pourtant, un conflit dans cette région aurait des conséquences graves, y compris pour notre pays. Bien sûr, ce serait avant tout une catastrophe pour les Taïwanaises et Taïwanais ainsi que pour les milliers de Chinoises et Chinois qui y laisseraient leur vie. Mais, vu les interconnexions fortes entre Taïwan et l’Occident, un conflit armé dans la région aurait également des conséquences extrêmement graves pour tous les pays ouverts au monde comme le nôtre, des pays très dépendants de produits de haute technologie, à l’instar des semi-conducteurs dont Taïwan est, et de très loin, le premier producteur mondial.

Il est donc aussi important pour notre Parlement de rappeler l’attachement qu’il porte à la stabilité mondiale, car cette motion, soulignons-le, traite de la seule diplomatie parlementaire. Elle ne vise aucunement à imposer un changement de positionnement de notre diplomatie, une position calée sur le choix du Conseil fédéral d’appliquer très strictement le principe d’une Chine unique, et ce même si certains parlementaires souhaiteraient que le Conseil fédéral fasse preuve de plus d’indépendance et de courage vis-à-vis du gouvernement de Pékin, particulièrement en matière de respect des droits humains, de démocratie et d’ouverture de ses marchés.

Mais la diplomatie parlementaire, vous le savez, est plus libre, plus éclectique et souvent plus courageuse aussi, c’est pourquoi la majorité de notre commission considère qu’elle complète avantageusement celle du Conseil fédéral tenue par des codes stricts de la diplomatie et engageant l’ensemble du pays par des décisions de ce fait davantage sujettes à la frilosité. Notre commission estime que le Parlement doit défendre les valeurs de notre pays en remplissant de manière complémentaire les objectifs de l’article 54 de notre Constitution fédérale.

Une minorité de notre commission considère au contraire qu’une telle démarche n’est pas adéquate. Certains redoutent que cela rende moins lisible la position de notre pays vis-à-vis de la Chine. D’autres craignent que cette démarche soit considérée par la Chine comme un acte hostile. Enfin, certains avancent que le Parlement en tant qu’institution ne peut pas se mêler de diplomatie.

La majorité de notre commission estime au contraire qu’à l’heure de la globalisation et alors que planent des menaces de plus en plus concrètes sur notre ordre international, il est dans l’intérêt de notre pays et de notre responsabilité en tant que parlementaires de défendre la démocratie. Cela passe par un renforcement des collaborations avec nos homologues dont l’existence même est contestée par des régimes de plus en plus autoritaires.

Pour toutes ces raisons, je vous invite à suivre la majorité de notre commission ainsi que le Bureau de notre conseil en soutenant vous aussi cette motion.