«J’appelle les travailleurs à faire barrage à l’extrême droite»
Le président de la Communauté genevoise d’action syndicale CGAS), Davide De Filippo, réclame dans la Tribune de Genève une mobilisation en faveur de Nicolas Walder pour contrer le candidat UDC le 19 octobre dans la course au Conseil d’Etat.
La faîtière des syndicats s’invite dans la bataille pour le Conseil d’État entre l’UDC Lionel Dugerdil et le Vert Nicolas Walder. Davide De Filippo, président de la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS), appelle les travailleuses et les travailleurs à voter pour l’écologiste afin de «faire barrage à l’extrême droite».
Le PLR roule aussi pour le candidat de l’UDC, relève le syndicaliste. «Il fut un temps où il y avait un consensus politique à Genève où, à l’exception de l’UDC, partis, patronat et syndicats s’accordaient sur la nécessité d’un cadre légal solide permettant un contrôle du marché du travail, pour éviter le dumping salarial et que des entreprises peu scrupuleuses fassent une concurrence déloyale aux autres.»
«Basculement»
Or «le soutien de la FER à l’UDC montre qu’elle ne souhaite plus s’embarrasser des règles, c’est un basculement. Lionel Dugerdil promet de défendre «les gens qui se lèvent tôt», mais il ne faut pas tomber dans le panneau. Son parti se place systématiquement contre toute régulation du marché du travail. Il est aussi contre le salaire minimum.»
Au niveau suisse, poursuit notre interlocuteur, «l’UDC combat les conventions collectives de travail, les syndicats, les mesures d’accompagnement à la libre circulation et la libre circulation elle-même».
Banalisation de l’UDC
Pour Davide De Filippo, l’UDC est bien un parti d’extrême droite, ce qui est controversé et ce que l’UDC conteste. «En Suisse, on a banalisé ce qu’est l’UDC, car on s’y est habitué, on ne perçoit plus son idéologie ultralibérale, xénophobe, populiste et résolument contre les intérêts des travailleurs. Certains de ses ténors soutiennent l’AfD et Trump. Il faut appeler un chat un chat.»
Il ajoute: «À Genève, l’UDC tente de faire porter la pénurie de logements et toutes sortes de maux sociaux sur les migrants. C’est typique de l’extrême droite qui, en réalité, ne veut pas moins de migrants, mais cherche à démanteler leurs droits pour en faire des travailleurs corvéables dont on se défait dès qu’on n’en a plus besoin. Aucun travailleur n’y a intérêt, car cela tire les conditions de travail de tous vers le bas.»
Davide De Filippo pense en particulier aux sans-papiers. «L’UDC s’est opposée à l’opération de régularisation Papyrus. Ce parti revendique la Sécurité. Si Lionel Dugerdil prend les rênes de l’Office de la population et des migrations, il n’y aura plus aucune régularisation. Il y aura donc davantage de clandestins et l’économie domestique sera livrée à l’exploitation la plus totale.»
Au niveau social, l’UDC genevoise s’est distinguée du parti national en soutenant la 13e rente AVS, tandis que Lionel Dugerdil représente l’aile agrarienne et plus modérée du parti. Cela ne rassure pas pour autant notre interlocuteur: «L’UDC a soutenu toutes les réformes s’attaquant aux retraites. Et on ne vote pas seulement pour une personne, on vote aussi pour un parti et sa ligne politique. Celle de l’UDC est antisociale, contre toute forme de redistribution des richesses, climatosceptique et discriminatoire à l’égard des minorités. Et autoritaire: Lionel Dugerdil lui-même a signé une motion de l’UDC qui, après des émeutes en France en 2023, consécutives à la mort d’un adolescent tué par un policier, appelait les forces de l’ordre genevoises à tirer à balles réelles contre les «pillards» qui tenteraient de traverser la frontière. Il faut savoir à qui on a affaire!» Interpellé sur ce point, Lionel Dugerdil répond: «Je suis pour un usage cadré et proportionné des armes à feu.»
Mais pourquoi semble-t-il partout normal, sauf à Genève, d’intégrer l’UDC au gouvernement, M. De Filippo? «Des contrats-types de travail n’existent qu’à Genève et au Tessin. Ailleurs, il n’y a pas de volonté de lutter efficacement contre la sous-enchère, cela montre qu’intégrer l’UDC dans les Exécutifs a des conséquences. Mais désormais à Genève aussi, il n’y a plus beaucoup de différences entre le PLR et l’UDC. Seul se distancie ce qui reste de la droite humaniste, celle qui veut un compromis social et un rôle protecteur de l’État.»
>> Lire l’article sur le site de la Tribune de Genève (10.10.2025)