La liste de l’UDC crée la polémique en usurpant l’appellation de « centre droit »
Les partis du Centre et des Vert’libéraux ont annoncé ne pas soutenir l’UDC Lionel Dugerdil en vue du 2e tour de l’élection au Conseil d’Etat. Malgré cela, la liste déposée par le parti d’extrême droite s’intitule «Alliance de droite et de centre droit» et ne mentionne pas «UDC», relate la Tribune de Genève. Une tromperie sur la marchandise dénoncée par les Vert.e.s.
C’est sur la liste «Alliance de droite et de centre droit» que Lionel Dugerdil se présente au second tour de l’élection au Conseil d’État. Au premier tour, elle était sobrement intitulée «UDC». Un changement légal, selon la Chancellerie, mais qui fait bondir le parti de Nicolas Walder.
Dans un communiqué, les Verts dénoncent une «tromperie», puisque Le Centre et les Vert’libéraux n’ont pas donné de recommandation de vote. Pourquoi une tromperie? Pour faire croire à «un soutien qui n’existe pas» et parce que l’UDC «sait que ses positions d’extrême droite ne peuvent pas rassembler», estiment les écologistes.
Président par intérim de l’UDC, Alexandre Chevalier réfute toute volonté d’induire l’électorat en erreur: «Le PLR, qui nous soutient, est de centre droit. Et Le Centre, comme son nom l’indique, revendique la construction au centre d’un bloc indépendant. Quant à l’étiquette d’extrême droite, elle est galvaudée, si elle nous correspondait, nous serions contre le système démocratique et électoral.»
«Quand on n’est pas d’accord avec eux (ndlr: la gauche), on est forcément d’extrême droite», attaquait pour sa part Lionel Dugerdil dans une vidéo de campagne, publiée sur les réseaux avant la polémique. Et le candidat, qui conteste avec force cette étiquette, de clamer: «Je représente la droite qui travaille, qui se lève tôt […].»
Arrondir les angles
Politologue à l’Université de Genève, Pascal Sciarini voit aussi dans le nom de la liste «une usurpation visant à arrondir les angles et rendre l’UDC plus respectable». Selon lui, «du point de vue institutionnel, il n’y a pas une grande alliance avec le centre droit, auquel appartiennent Le Centre et les Vert’libéraux, qui pourraient se sentir instrumentalisés.» Ce n’est pas le cas du président du Centre, Philippe Rochetin, qui classe son parti au «centre droit». «Les Verts feraient mieux de se concentrer sur la campagne de Nicolas Walder», balaie-t-il.
Selon Pascal Sciarini, «le PLR représente la droite libérale et l’UDC la droite dure, radicale, nationaliste.» La qualifie-t-il d’extrême droite? «Dans ce débat, il y a des controverses du point de vue scientifique.» Lors des fédérales en 2023, des journaux étrangers qualifiaient l’UDC d’extrême droite pour son programme sur l’immigration, tandis que les médias suisses évitent en général ce terme pour cette formation perçue comme respectueuse des institutions.
Politologue à l’Université de Lausanne, Oscar Mazzoleni estimait, pour sa part, dans un entretien à Swissinfo que la catégorie extrême droite ne permettait pas de saisir la complexité de ce parti proche économiquement de la droite traditionnelle et de gouvernement, tout en s’affichant contre l’establishment. À l’inverse, l’historien genevois Charles Heimberg le plaçait dans la même constellation d’extrême droite que la Lega en Italie, Vox en Espagne ou encore l’AFD en Allemagne en leur voyant des dénominateurs communs: nationalisme, identitarisme, récupération de la souveraineté nationale, critique profonde du multilatéralisme et du multiculturalisme, islamophobie…
Ligne agrarienne
En février de cette année, le politologue à l’Université de Fribourg Gilbert Casasus évoquait un «parti charnière, entre la droite classique et l’extrême droite», réagissant au soutien apporté par l’ancien conseiller fédéral Ueli Maurer à la leader de l’AFD Alice Weidel.
Pour le député Vert Julien Nicolet-dit-Félix, l’UDC se classe à l’extrême droite au vu du «caractère démagogique et extrémiste» de nombreuses de ses propositions au Grand Conseil genevois. Il cite la «volonté de supprimer la Ville de Genève ou encore les nombreuses attaques contre les minorités LGBTIQ+».
Son collègue de parti Omar Azzabi rappelle encore que l’UDC genevoise a refusé l’interdiction des symboles nazis et tenté de «placer la police au-dessus des lois». Au niveau national, il liste les condamnations de plusieurs membres de l’UDC pour racisme.
«Je refuse de nous laisser enfermer dans une case par des adversaires, répond Alexandre Chevalier. Notre parti ne se résume pas aux positions de l’un ou l’autre de ses membres. Lionel Dugerdil est rassembleur, il défend une ligne agrarienne, conservatrice et populaire. Et nous menons une campagne positive. Sans attaquer les délires wokistes.»
>> Lire l’article sur le site de la Tribune de Genève (02.10.2025)