Pour une neutralité lisible et crédible
L’initiative «Sauvegarder la neutralité suisse», lancée par l’UDC, a été déposée le mois dernier à la Chancellerie fédérale. C’est l’occasion pour le conseiller national genevois du parti Les Vert.e.s, Nicolas Walder, et pour la conseillère nationale genevoise de l’UDC, Céline Amaudruz, d’expliquer ici leur conception respective d’un principe helvétique qui n’a pas fini de faire parler de lui.
L’invasion illégale de l’Ukraine par le régime russe marque un tournant dans la politique de sécurité européenne. La démocratie et l’ordre mondial fondé sur des règles communes sont désormais, jusqu’en Suisse, ouvertement attaqués par des régimes autoritaires avec le soutien des partis de droite populiste. À cela s’ajoute la crise climatique qui, sans contre-mesures rapides et ambitieuses, rendra de larges territoires inhabitables et entraînera de nouveaux conflits pour la répartition des ressources, contribuant d’autant à la déstabilisation de l’ordre international.
Ces développements placent la politique étrangère suisse devant des défis inédits qui n’ont plus rien à voir avec ceux qui, depuis 1515, influencent la façon dont notre neutralité est appliquée. Comment dans ces conditions assurer au mieux la sécurité de notre pays, situé au cœur de l’Europe? Comment renforcer les 17 Objectifs du développement durable de l’ONU, dont la paix et l’ordre international sur lesquels sont basés notre prospérité et le respect de nos frontières?
Face à ces enjeux titanesques, l’UDC propose naïvement un repli sur une neutralité intégrale prétendument séculaire et perpétuelle. Son initiative ne fait au final que renforcer une conception chimérique de la neutralité; un folklore bourgeois dont le but essentiel est de pouvoir faire des affaires en toute légalité avec Poutine et de fermer les yeux sur les violations des droits humains. Et tout cela sans contribuer ni à la défense de l’Europe et de nos libertés, ni à la lutte contre le changement climatique, ni à la paix et à la stabilité dans le monde. Non, la neutralité de la Suisse ne constitue pas une fin en soi. Elle doit se concevoir comme un instrument de la politique extérieure et de la sécurité intérieure de notre pays. Il semble ainsi juste que la Suisse ne s’implique pas militairement hors de ses frontières et s’en tienne à la neutralité militaire dans les limites clairement définies par la Convention de La Haye de 1907.
Une position qui ne doit néanmoins pas servir d’oreiller de paresse. C’est ainsi que notre pays doit redoubler d’engagements pour promouvoir la paix, la justice et le droit au niveau international. En commençant par apporter un soutien aux réformes de l’ONU, et notamment du Conseil de sécurité, pour qu’il gagne en légitimité et soit en mesure de faire appliquer le droit international. Et en attendant, notre pays doit renforcer ses collaborations avec les États démocratiques et en premier lieu nos voisins européens, afin de promouvoir la justice et la paix, y compris en adoptant des sanctions contre les États et personnes violant le droit international.
>> Lire le texte et l’article de Céline Amaudruz (UDC) sur le site de la Tribune de Genève (gratuit, 08.05.2024)