Texte de l’intervention:

Mon postulat, déposé le 17 juin 2021, avait pour but d’objectiver la position de la Suisse dans les négociations du BEPS, particulièrement en ce qui concernait le pilier 2. Ce dernier comprend l’introduction d’un taux d’imposition minimale pour les entreprises multinationales réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions de francs. La position affichée du SECO durant ces négociations au sein de l’OCDE était que l’introduction d’un tel taux minimal n’était pas dans l’intérêt de la Suisse. Si d’aventure des négociations aboutissaient, le SECO souhaitait que ce taux soit le plus bas possible.

Cette position interroge légitimement, sachant que l’intérêt de la Suisse ne peut pas se résumer à vouloir attirer les sièges d’entreprises multinationales et à la seule défense de leurs intérêts. Qu’en est-il de notre intérêt de voir la mise en place d’une coopération internationale en matière fiscale qui éviterait la sous-enchère très dommageable pour l’ensemble des pays y compris le nôtre? Il n’est en effet pas dans l’intérêt de notre pays de voir des Etats ne plus pouvoir faire face à leurs obligations en matière d’infrastructures, de prestations sociales ou d’engagements environnementaux. Cela est d’autant plus délicat dans cette période d’incertitude globale née avec la pandémie et aggravée par le conflit en Ukraine, la crise énergétique et le très rapide réchauffement climatique. Autant de facteurs qui menacent de peser de plus en plus lourd sur les finances des Etats. En matière climatique, par exemple, le non-respect de ses engagements par un Etat faute de moyens affectera directement les habitantes et habitants de Suisse, qui en subiront aussi les conséquences.

C’est pourquoi il est indispensable que le Conseil fédéral développe et argumente plus en détail sa conception de l’intérêt de la Suisse dans les différentes négociations dans lesquelles il est engagé en matière économique. Il ne doit, à mon avis, plus limiter sa vision aux intérêts économiques à court terme. C’est pourquoi j’ai demandé qu’il étudie en toute transparence les différents scénarios alors envisagés, en explicitant concrètement les conséquences programmées, directement et indirectement, tant sur notre économie que sur la stabilité et la paix dans le monde. En effet, la capacité des Etats à répondre à leurs obligations sera déterminante ces prochaines années.

Depuis le dépôt de mon postulat, les négociations au sein de l’OCDE ont avancé. A ce jour, elles ont heureusement abouti à un accord avec un taux de 15 pour cent qui entraîne une adaptation des législations dans la plupart des Etats de l’OCDE, y compris le nôtre où cet objet sera soumis à la population en juin prochain. Par conséquent, mon postulat, qui visait à évaluer différents scénarios, n’est plus d’actualité. Je le retire donc.
En revanche, j’insiste sur ce point: il reste d’actualité que le Conseil fédéral prenne l’habitude d’élaborer plus en détail ce qu’il considère comme étant les intérêts de la Suisse, pour que ceux-là ne se résument plus à l’intérêt de quelques multinationales ou à nos recettes fiscales à court terme.