Le bombardement d’une maternité, d’une école et d’une centrale nucléaire ont déjà imprimé l’horreur et la folie de cette guerre barbare dans nos esprits. Tout comme est déjà gravé dans nos cœurs le courage des Ukrainiennes et des Ukrainiens prêts à se sacrifier pour leurs libertés.

Les Suissesses et les Suisses, comme des habitant.e.s du monde entier, se sont très tôt mobilisés pour leur exprimer toute notre admiration et leur témoigner notre solidarité dans la tragédie qu’ils sont contraints de traverser, qui en apportant une aide matérielle, qui en accompagnant ou en accueillant chez elles/eux des familles fuyant l’Ukraine.

Maintenir la pression

Face à tant de souffrance, le Conseil fédéral a pour sa part eu amplement raison de condamner rapidement et avec fermeté une invasion russe totalement illégale et illégitime. Il a également eu raison de décider d’appliquer scrupuleusement les sanctions de l’Union européenne (UE) à l’encontre de Poutine, de son régime sanguinaire et de son pays. Le Conseil fédéral doit poursuivre sur cette voie en reprenant systématiquement toutes les sanctions de l’UE, même si le conflit venait à durer. 

Ce n’est toutefois pas suffisant. Car la Suisse continue de financer grassement la machine de guerre du Kremlin par son addiction aux énergies fossiles. Et si les importations de fuel et de gaz russe nous permettent de finir l’hiver bien au chaud et d’alimenter nos 4×4 pour rejoindre les stations de ski, les Ukrainiennes et Ukrainiens eux meurent sous les bombes financées par nos devises. C’est insupportable! Il faut donc cesser immédiatement toutes les importations de gaz et de pétrole en provenance de Russie en invitant notre population à plus de sobriété, participant du même coup à préserver notre planète.

Devoir  éthique

Nos autorités devront aussi renforcer rapidement la législation imposant des normes éthiques, sociales et environnementales aux entreprises, y compris en temps de paix, comme le demandait l’initiative “Entreprises responsables” acceptée par le peuple mais malheureusement refusée par une majorité de cantons en novembre 2020. Les atteintes récurrentes aux droits humains dans la Russie de Poutine auraient dû nous alerter bien avant le début de l’invasion de l’Ukraine et nous inciter à plus de retenue dans nos relations économiques. 

Nous sommes aujourd’hui contraints d’imposer des sanctions et d’inviter nos entreprises à interrompre toutes leurs relations commerciales avec la Russie. En commençant par les multinationales et  les sociétés financières et de trading. Nous devons être prêts à isoler la Russie sportivement, culturellement et économiquement jusqu’à ce que Vladimir Poutine comprenne que l’Ukraine ne lui appartient pas! Et ceci ne relève pas de la théorie: dans son émouvant appel en direct de Kiyv aux Suissesses et Suisses réunis sur la place fédérale le 19 mars, le président Zelensky lui-même n’a-t-il pas dénoncé nommément des multinationales helvétiques qui continuaient à faire honteusement commerce en et avec la Russie, faisant fi de toute éthique?

Garder la tête froide et promouvoir la paix

En matière de sécurité, notre pays doit garder la tête froide. Et s’il peut être judicieux de réévaluer notre stratégie de défense, cela doit inclure les menaces contemporaines telles la cybersécurité et tenir compte d’un renforcement de notre coopération avec l’UE. Mais la réponse la plus durable pour la Suisse reste la promotion de la paix, le désarmement – y compris nucléaire – et la défense du droit international.

C’est pourquoi notre pays doit dans ce domaine aussi redoubler d’efforts pour rappeler les règles du droit international, par exemple en tant que dépositaire des Conventions de Genève sur le droit international humanitaire. 

Aide matérielle et financière

La Suisse a bien sûr aussi un rôle clé à jouer en matière de solidarité. Nous devons soutenir très généreusement les Ukrainiennes et Ukrainiens financièrement et avec des produits alimentaires, du matériel médical et tout ce qui permettra d’éviter plus de morts et de souffrances, à l’heure où Vladimir Poutine n’hésite plus à cibler les civils.

Parallèlement, alors que des milliers de familles suisses accueillent à bras ouverts des Ukrainien.e.s fuyant la guerre, notre pays devra maintenir ses frontières largement ouvertes en démontrant ainsi qu’une politique d’asile humaniste est non seulement possible, mais encore fédératrice autour de valeurs d’accueil qui nous sont chères. Et cela est vrai que la population en détresse vienne d’Ukraine ou d’Afghanistan.

Menaces sur notre démocratie

Avec l’Ukraine, c’est aussi notre démocratie et notre mode de vie qui sont en jeu. C’est notre honneur également. Car après des décennies à fermer les yeux sur les exactions commises par le Kremlin; après que certains élus UDC à Berne aient osé, il y a encore quelques semaines, tresser des louanges à Vladimir Poutine et ses méthodes autocrates; après que notre cupidité nous a incités à ignorer tous les signaux d’alerte sur ses dérives, nous portons une part de responsabilité dans ce qui arrive à l’Ukraine. Est aujourd’hui venu le temps de l’assumer! Comme est venu le temps de dire clairement à Vladimir Poutine que tant qu’il violera leur territoire, nous serons toutes et tous des Ukrainiennes et des Ukrainiens!