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Bruits de bottes, bombements de torse, démonstrations de force, actes de déstabilisation, simulations de retrait ou attaques et bombardements ciblés, y compris d’écoles comme on l’a vu ce vendredi 18 février: les menaces que fait peser la Russie du glacial président Poutine sur l’Ukraine depuis des années sont aujourd’hui à leur comble depuis l’arrivée de son armée en Crimée, et les risques d’un nouvel embrasement du conflit avec l’Ukraine sont plus réels que jamais.

Face à la Russie, le Conseil fédéral doit réaffirmer clairement son attachement au droit international, aux valeurs démocratiques et aux droits humains. Sa position doit être claire et ferme en rappelant le statut de la Crimée et du Donbass comme parties intégrantes de l’Ukraine. Dans le même temps, la Suisse doit tenir les parties qui ont le contrôle effectif du territoire, soit la Russie en Crimée et des groupes armés coordonnés avec le gouvernement russe dans le Donbass, pour responsable des violations des droits humains sur ces territoires, au sens du droit international.

Dissuasion

Elle ne doit pas hésiter à brandir – avec l’Union européenne et les autres démocraties libérales – l’arme de dissuasion que sont des sanctions économiques et diplomatiques sévères et ciblées (exclusion du système de paiement Swift, arrêt du projet gazier Nord Stream 2, par exemple) en cas de nouvelle provocation russe menaçant la souveraineté et le droit à l’autodétermination de l’Ukraine.

Néanmoins, il faut se souvenir qu’une invasion de la Russie serait une tragédie pour les Ukrainiennes et les Ukrainiens comme pour l’ensemble de l’Europe et au-delà. Nos voisins Français et Allemands l’ont bien compris, eux qui déploient des moyens diplomatiques considérables pour éviter un embrasement.

Rôle indispensable

C’est pourquoi, riche de sa tradition humanitaire, légitime en tant qu’hôte des plus influentes institutions internationales, garante du respect des Conventions de Genève et récemment saluée pour avoir permis sur son sol des rencontres au plus haut niveau entre Russes et Américains, la Suisse a un rôle indispensable à jouer dans la désescalade du conflit entre Russes et Ukrainiens. 

Elle doit donc redoubler d’efforts pour offrir ses services sachant que son intérêt est aussi que ces éventuels accords se situent dans le cadre du multilatéralisme et non dans celui de négociations bilatérales menées de manière désordonnées et sans réelles garanties de durabilité. Pour ce faire, le Conseil fédéral doit s’appuyer sur les institutions que sont l’OSCE et l’ONU, en proposant par exemple un monitoring indépendant mené par ces deux organisations, seul susceptible de garantir de façon crédible le respect des engagements des deux parties et en particulier ceux liés au retrait de troupes et d’équipements militaires de la Russie. On attend ainsi de la Suisse qu’elle prenne un leadership fort au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, dont la 49e séance s’ouvre le 28 février, pour tenir la Russie responsable des violations des droits humains commises en Crimée et dans le Donbass.

L’expertise suisse

Enfin, le Conseil fédéral ne doit pas abandonner l’Ukraine pour autant. En se rappelant des événements de l’Euromaïdan à Kiev en 2014, la Suisse a l’occasion de montrer aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens qu’elle a entendu leur volonté de proximité avec l’Europe et d’échanges avec l’Union européenne et de porter l’écho de cette aspiration démocratique sur la scène internationale. C’est aussi en accompagnant résolument l’Ukraine dans ses domaines d’expertise – la lutte active contre la corruption et la transformation des structures économiques, par exemple – que la Suisse pourra participer au renforcement de la démocratie dans ce pays… une fois que les bruits de bottes russes se seront définitivement éloignés.